Le cabinet Roland LIENHARDT a développé depuis plusieurs années des argumentaires destinés à ne plus payer les sommes réclamées par la Société pour la Perception de la Rémunération Équitable de la Communication au Public des Phonogrammes du Commerce (Spré).
Attention, à l’heure actuelle, les tribunaux de grande instance de Paris et de Bordeaux ont systématiquement rejeté ces demandes. La cour d’appel de Paris est saisie depuis mai 2017 dans le cadre d’une procédure d’urgence (circuit court), mais la SPRE sollicite et obtient report sur report, ce qui a pour effet de retarder la procédure et la possibilité de saisine de la Cour de cassation, espérant ainsi que les plaideurs s’épuisent et renoncent.
Un procès n’est gagné ou perdu que lorsqu’il est fini et que l’on a épuisé les voies de recours. Étant donné sa composante politique, les procédures sont donc longues et difficiles.
Ce dossier est cependant fondé sur un constat totalement évident. Depuis 1987, les membres de la commission qui devaient être désignés par les organisations d’usagers et de bénéficiaires de la rémunération équitable n’ont jamais été ni désignés, ni nommés, alors que la commission étant un organisme administratif à compétence nationale, les désignations de ses membres sont des actes administratifs (article R312-9 du code de justice administratif) et doivent donc exister, ne serait que pour pouvoir être contestées devant un juge.
Or, il est totalement impossible de savoir qui sont les membres de la commission, titulaires et suppléants et à quelle date démarre leur mandat de trois ans !
De plus, l’article R.214-5 du code de la propriété intellectuelle énonce que la commission ne délibère valablement que si les trois quarts de ses membres sont présents ou suppléés, ce qui n’a jamais été le cas, puisque les membres de la commission n’existent pas et n’ont jamais été convoqués. Dans ces conditions, les décisions ne pourront donc qu’être finalement déclarées illégales.
Le ministère de la culture a d’ailleurs refusé de communiquer les désignations des membres de la commission, les convocations et les procès verbaux…La commission se réunit en présence de personnes qui n’ont jamais eu la qualité de membres de la commission et n’ont jamais été convoquées.
Aucune des nombreuses décisions rendues par le TGI de Paris n’a contredit ces affirmations.
La réglementation relative à la rémunération équitable dont se prévaut la Société pour la Perception de la Rémunération Équitable de la Communication au Public des Phonogrammes du Commerce (Spré) ne peut donc qu’être inopposable aux usagers, puisqu’elle se fonde sur des actes juridiquement inexistants et/ou illégaux. Selon notre démonstration, le fait de ne pas payer les sommes réclamées par cette société privée ne saurait en conséquence sérieusement fonder une quelconque condamnation au titre de la contrefaçon. En effet, la SPRE n’est pas une administration et ne bénéficie pas du privilège de l’exécution.
Le Conseil d’État a été saisi du dossier pour la première fois en juillet 2017. Un rapporteur a été nommé le 23 janvier 2018, le conseiller réviseur en mars 2018. Le rapporteur public a été désigné en juin 2019. L’affaire a été inscrite à deux séances d’instruction en juin et juillet 2019. Elle a été appelée à l’audience publique du 26 septembre 2019.
Par décision du 14 octobre 2019, et après 27 mois d’instruction, le Conseil d’État a botté en touche et considéré que les recours étaient irrecevables. Sa décision est néanmoins intéressante. Il a en effet considéré que la nomination irrégulière des membres de la commission n’était pas de nature à entacher les décisions réglementaires d’inexistence, alors que l’ensemble des décisions rendues jusqu’à présent par les Tribunaux de Grande Instance de Paris et de Bordeaux ne répondent pas sur la question de l’inexistence des membres de la commission et indiquent que la SPRE compose la commission, laquelle n’a donc pas besoin d’avoir de membres identifiables. Nous mettons cette décision en ligne, et en présentons un commentaire.
En matière administrative, seule une décision qui annule un règlement a autorité de la chose jugée. De plus, l’autorité relative n’est attachée qu’à la motivation retenue. Or, la motivation retenue par le Conseil d’État, fort brève, ne figure pas dans les recours. Elle ne figurait d’ailleurs pas non plus dans les précédents recours, ce qui soulève quelques interrogations…,
Cette décision du Conseil d’État permet à la Société pour la Perception de la Rémunération Équitable de la Communication au Public des Phonogrammes du Commerce (Spré) de gagner du temps.
Conformément aux prescriptions du Conseil d’État, de nouveaux recours, précédés d’une demande préalable, ont été déposés dés février 2020. Ils sont instruits, un rapporteur a été nommé. Il a sollicité de la SPRE qu’elle intervienne dans les débats, démontrant ainsi leur caractère sérieux.